Photos, livres, aventures.

À vendre, chapelle ambulante, 6 cylindres, 140 chevaux





















Le révérend Branford Clarke, faisant la tournée des brebis égarées sur Internet dans sa chapelle ambulante, ne semble pas apprécier les annonces que nous venons juste de faire paraître.





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source photo: Underwood and Underwood, National Geographic image collection

Plaisir corrélatif



Il
n'y a pas de quoi se vanter, mais je perds quand même un temps considérable sur Internet, où l'on trouve de tout, c'est bien connu, et souvent du pire. Comme par ailleurs j'ai toujours aimé lire les petites annonces dans les journaux, je prolonge de temps en temps ce plaisir sur mon ordinateur.
De l'appareil photo à la roue de secours pour chaise roulante, et du cadre de vélo rouillé au lot de 200 paires de chaussures identiques, on y croise vraiment de tout, et notamment beaucoup de solitudes.
En voici quelques unes parmi celles que que j'ai pu voir lors de ma dernière plongée dans ce monde fascinant. Je les reproduis telles quelles, fautes comprises.



Femme grosse ou très grosse recherchee
Femme ronde (avec surplus de poids) ou tres ronde (avec enorme poids) recherchee. Je vais vous faire trembler avec du plaisir. Je suis deja excite.
Je vous aime ma chère,

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Recherche femme en sainte pour sexe pret a payer
Envoye moi une photo.

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Salut!!!
Très beau noir de Montreal qui aimerait voir un couple de 20-45 ans en debat sexuel.


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1 Homme 38 ans recherche 1 femme pour plaisir corrélatif
Ce que je recherche est une femme Hors Norme (définition un peu plus bas dans l'annonce). Ma quête est le plaisir charnel sans attache (mais peut être occasionnel).
Ce que je ne veux pas:
1) échange de sous!
2) copulation
Ce que je veux
1)Tendresse mutuelle
2) Sensualité mutuelle
3) Respect mutuel
4) Plaisir mutuel

Selon moi, voici ma définition d'une femme hors norme: Très Très petite taille, très forte taille. Age. Très très petite, très très grande. (pour + de détails ou... précision, écrivez moi!..

J'ai aucun TABoo; aucune limite. Quelque soit ton style, ton ethnie; si nous nous plaisons communément... nous nous amuserons. Une fois sur une terrain "neutre", nous nous évaderons ensemble...

Naturellement, tout commence par l'échange de photo! Ensuite... le plaisir débute!

Mesdames, a vos claviers, je vous attends!






L'aerocar et le tourbillon

















Ci-dessus, une carte postale ancienne achetée il y a deux ans dans une librairie d'occasion.
Ci-dessous, une photo prise sur les lieux du crime cet été.
L'endroit, le gigantesque tourbillon situé en amont des chutes du Niagara, et cet invraisemblable téléphérique survolant les eaux tumultueuses pour aller rejoindre, en face, la rive américaine.
Un seul regret, que les vents trop violents ce jour-là aient empêché la cabine de circuler, et donc de reproduire l'image encore plus à l'identique.

























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Plaisir coupable et police anglaise





















Parmi les joies innombrables de la lecture, l'une de mes favorites est sans aucun doute la découverte dans un vieux livre - qu'il ait été trouvé d'occasion au fond d'une obscure librairie ou qu'on l'ait exhumé du grenier de ses grand-parents - d'un marque-page laissé par un lecteur ancien.
Tickets de métro, listes de courses, tickets de caisse (j'en ai trouvé un en Francs français récemment!), cartes postales, photo d'une ex, coupures de journaux, feuilles d'arbres, etc. Autant d'indices et de fenêtres ouvertes sur des inconnus et des pans de mémoire enfouis.
Je dois avouer que je prends moi-même un plaisir coupable à en farcir mes livres, tant par anticipation de mes délectations futures quand sera venu le temps de la sénilité, que pour laisser des traces de rien aux curieux à qui échoueront un jour ses volumes.

Quoi qu'il en soit, cette policière anglaise courant après de petits garçons nus sortis de la rivière est tout de même un des plus beaux spécimens qu'il m'ait été donné de voir à ce jour.





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NB: Au moment de poster cette note, il me revient tout d'un coup que l'excellent Thierry Horguelin vient de faire une note similaire sur Locus Solus, catégorie marque-page, option carte de bibliothèque.
Toute ressemblance est purement fortuite, signe que la sénilité est encore plus proche que je ne le craignais.



Carte postale


























Dernier soubresaut vacancier avec cette carte postale envoyée par l'un des fiers marins du Bathyscaphe.


Précisons pour être honnêtes que cette carte fait partie de la série "Le Monde de l'Univers", créée et publiée par la maison suisse Plonk et Replonk éditeurs.



Les corbeaux saliveurs





















 





"L'Écorcobaliseur a disparu. La dernière fois qu'on l'a vu, il se promenait dans le port de Menfrez avec, au bout du bras, la tête ensanglantée de son frère."

C'est ainsi que s'ouvre L'Écorcobaliseur, le premier roman au nom imprononçable de Bérengère Cournut, paru aux éditions Attila. On ne se risquera pas ici à résumer l'intrigue que laisse supposer les premières lignes. Il suffira de savoir que l'Écorcobaliseur a un frère, l'Anicétonque, et une soeur, l'Isandreline, que les trois étaient jusque là indissociables et complémentaires, et que cette union leur est indispensable pour faire face à l'absence d'un père, d'un vide, d'un manque originel.

On est ici à mille lieues marines des travers habituels d'un premier roman. Pas de récit de rupture amoureuse ni de passage initiatique d'un "je" nombriliste. Encore plus rare, pas de pose ni de cynisme, comme si l'auteur avait déjà accompli sa mue avant de se lancer dans l'écriture de ce roman. Mais alors?
Alors, quelque part entre la tragédie intemporelle, le roman symbolique et le voyage imaginaire dans une sorte de triangle des Bermudes de la fiction, Cournut réussit à nous entraîner à sa suite dans une course à la compréhension des faits, du vide, du monde et du manque.
L'Écorcobaliseur est un roman liquide. Il y a Menfrez, le port d'attache, et La-Mer, qui est une île sur laquelle des Bédouins ont échoué sans que l'on sache comment. Entre les deux la géographie est incertaine, on pourrait être à la pointe de la Bretagne, aux confins des îles grecques ou dans le labyrinthe du Jutland. Cela n'a pas d'importance, on dérive de toute façon plus qu'on ne navigue, et pour naviguer, on s'en remet à l'étrange capitaine Hermann et à Henric, le marin au long cours.
Il arrive aussi que l'on communique grâce à des bancs de poissons en migration. Les objets les plus inattendus, comme la guillotine alternative, y sont présentés le plus simplement du monde. L'air, l'eau et le sable sont les éléments constituant ce roman aux lointains accents de Henri Michaux (1).




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- L'Écorcobaliseur, de Bérengère Cournut, Paris, éditions Attila, 192 p., 16 euros.

(1) Nous ne sommes pas les seuls à le dire, le Matricule des anges aussi par exemple.




Des rayons dans les mains

J'ai vraiment besoin d'une bibliothèque supplémentaire. Celles que j'ai débordent de toutes parts, et des piles sauvages commencent à s'élever dans tous les coins à la vitesse d'une ville chinoise au galop.
Cet après-midi, je suis donc allé au magasin de meubles usagés qui se trouve tout près de chez nous, dans l'espoir d'en revenir avec suffisamment de rayons dans les mains et de bois sur le dos pour régler cette histoire de rangement.
Malheureusement, je n'ai rien trouvé d'intéressant. Du coup, avec l'argent que je n'avais pas dépensé, je suis allé m'acheter des livres d'occasion.










Paris, mon pote





















 








Les éditions Le Dilettante ont publié discrètement cet été Paris, mon pote, de Robert Giraud. Grand bien leur en a pris.
Tout limougeau qu'il est, Robert Giraud fut l'un des plus fins observateurs du Paris d'après-guerre, où il a débarqué encore jeune à sa sortie de prison.
Dans la lignée des piétons-piliers de bar-poètes-amoureux de leur ville, c'est logiquement que Giraud fut l'ami de l'autre Robert, Doisneau, mais encore de Jacques Prévert et de Jacques Yonnet, l'auteur de l'unique et inoubliable Rue des maléfices.
Si les amateurs considèrent Le Vin des rues comme son meilleur livre, Paris, mon pote n'en n'est pas moins intéressant.
Recueil d'articles parus dans diverses revues, qui sont autant de portraits touchants de ce Paris alors en train de disparaître, on y retrouve quelques uns des classiques de l'imaginaire parisien: les bals musettes et le flon-flon, les fortifs, les Gitans de Paris, la porte de Montmartre, le canal Saint-Martin, le tout sous l'œil vigilant des concierges et des hirondelles en vélo.

Extrait:
"Les pianos mécaniques, ceux qui les ont pratiqués en conservent une nostalgie semblable à celle que ranime un parfum reniflé par hasard sur un mouchoir abandonné à la suite d'une nuit d'amour inespérée, les pianos mécaniques, donc, ont fait leur temps. Par la magie d'une pièce de deux sous en bronze, la vraie, d'avant-guerre, la grande, ils rythmaient les heures, les unes après les autres, des réunions intimes tenues dans les estaminets des bordels de province. C'était indispensable."

On se délectera en passant de la préface d'Olivier Bailly, qui prépare aux éditions Stock une biographie de Robert Giraud sous le titre Monsieur Giraud, vous ne serez jamais un garçon sérieux.




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- de Robert Giraud : Paris, mon pote, Paris, éditions Le Dilettante, 2008, 157 p., 17 euros / 34,95$ Can.
- de Jacques Yonnet : La Rue des maléfices, Paris, éditions Phébus, coll. "Libretto", 10,50 euros / 20,95 $ Can.