Photos, livres, aventures.

 À l'heure des prix littéraires et du vingt millième article sur le succès supposé du livre numérique, voici deux exemples de vieillards qui tiennent la route.
Parce que, bien sûr on achète aussi un livre à cause de sa couverture, il était impossible de ne pas acheter cette édition des Neiges de Kilimandjaro au Club du meilleur livre, en 1957, avec une de ces maquette reconnaissables de Robert Massin.

Pour les mêmes raisons, je n'ai pas pu résister à cet autre petit trésor de couverture et de mise en page, ce recueil de nouvelles d'Ambrose Bierce - le redoutable auteur du Dictionnaire du diable - regroupées sous le titre de Passage du Styx, au Club français du livre en 1962.















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Pistolet à Léaud




Jean-Pierre Léaud et François Truffaut sur le tournage de La Nuit américaine. Ou comment le fils fantasmé tue le père de substitution. Et vlan! Vingt ans de psychanalyse!













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Le Bathyscaphe & le bois de mer


Tandis que les feuilles tombent, le Bathyscaphe remonte à la surface pour une sixième fois et rentre au port  juste à temps pour marquer l'arrivée de l'automne avec un sommaire plus enivrant que jamais :







D'ores et déjà on nous télégraphie
que l'on pourra y lire des textes des fiers plongeurs
Romy Ashby, Simon-Pierre Beaudet, Jean-Yves Bériou, Daniel Canty, Benoît Chaput, Bérengère Cournut, Patrick-Guy Desjardins, Hélène Frédérick, Joël Gayraud, Sarah Gilbert, Thierry Horguelin, A.J. Kinik, Hermine Ortega, Antoine Peuchmaurd, Hannah Reignier, Pierre Rothlisberger, Valérie Webber

qui parleront, entre autres de
Robert Lebel, la Bouquinerie du plateau, l'île d'Astypalée, Brian Eno, cruciverbisme anglais, la revue Capharnaüm, la dévastation du territoire québécois, la dévastation de Montréal, Dr. John, Marc Bernard, Goose Bay, les éditions Finitude, Haendel, Henri-Pierre Roché, Héraclite, rails et terrains vagues, François Truffaut, les noms d'oiseaux, Alistair MacLeod, la liaison Le Havre-Malte sur un cargo, le disque «Pour en finir avec le travail», l'adieu au légendaire Fedora de New York, Tuli Kupferberg, Richard Huet, couvents fantômes, John Cowper Powys, la ville souterraine de Montréal, Giorgio di Chirico, la frontière fermée aux anarchistes, les psychologues et les travailleurs du sexe, la magie du livre imprimé

ceci accompagné d'images de
Sarah Jade Bernier, Maïcke Castegnier, Geneviève Castrée, Jacques Desbiens, Julie Doucet, Alexandre Fatta, Michel Hellman, José Guadalupe Posada, Barthélémy Schwartz

et bien sûr
du grand jeu casse-tête de Thierry Horguelin et
du feuilleton typographique de Monsieur Moulino














Maxime Catellier s'est fait connaître comme critique (il a longtemps dirigé la section culturelle du journal Ici), comme essayiste (La mort du Canada) et romancier (Le corps de la Deneuve), il est d'abord et avant tout un fin poète.  
Bois de mer est son second recueil pour la maison d'édition L'Oie de Cravan, et sa voix y est plus juste que jamais :

Dans la bataille sans armes
où nous nous livrons
les uns aux autres,
le roi est à genoux
et les reines sans maître


Le recueil est accompagné de photos prises par l'auteur et la couverture, illustrée de peintures de Claudine Desrosiers. Il se veut un hommage aux couvertures des éditeurs pionniers de la poésie au Québec tels Erta ou le premier Hexagone.  Photos et peintures seront exposées à la librairie. On raconte même que Maxime Catellier y chantera! Que cela ne vous empêche pas de venir faire un tour puisque vin et amuses-gueules n'attendrons que vous.












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Comme quoi il n'y a pas que des châteaux en France, même ici à Turenne (Corrèze), où il en est un très beau par ailleurs, voici un décor que l'on imagine facilement trouver sur la route du Labrador.








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Adieu Fombonne





















Il serait à peu près aussi vain de vouloir résumer un roman d'Emmanuel Bove que de le faire avec un livre d'André Dhôtel ou, plus près de nous mon dieu, de Jean Echenoz, tellement chez ces gens-là l'histoire se répète et se décline sur des modèles souvent semblables.
Ses histoires ont un aspect suranné qui n'est pas sans évoquer le ton de certains classiques du XIXème. Lire Bove, c'est comprendre l'ennui éternel et la mélancolie lourde des dimanches de province. Dans Adieu Fombonne, l'anti-héros (puisqu'il ne saurait être question de héros) se nomme Charles Digoin, c'est un homme ordinaire, qui aspire à un confort petit bourgeois en vivant dans la crainte d'être rattrapé par son passé.
Rien de haletant, au contraire même. Mais l'intérêt de l'écriture de Bove, ce qui fait qu'on doit le lire encore aujourd'hui, c'est son sens aïgu du menu détail et sa rigueur dans le choix de chaque mot. Ajoutons à cela un penchant pour l'ellipse et le récit non linéaire, et l'on a un auteur de chez Minuit avant la lettre.



"Les lettres désagréables ont quelque chose de particulier. Le timbre lui-même ne ressemble pas à celui des autres lettres. Il paraît mieux collé, comme si on l'avait frappé du poing. Sans être graphologue, on découvre dans l'écriture des signes peu sympathiques. Le premier mot, Monsieur ou Madame, ou même Mademoiselle, n'a été écrit que par formalité."

 Adieu Fombonne, Emmanuel Bove, 1937, Le Castor Astral, 1994 et 2005.

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À lire aussi :
- Le pressentiment, Castor Astral, 2006
- Mes amis, Flammarion, 1993.



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Ô Paon



Une fois n'est pas coutume, c'est de musique qu'il sera question aujourd'hui, à l'occasion de la sortie du nouvel album de la dessinatrice-auteure-compositrice-interprète Geneviève Castrée.

Un automne, deux hivers et un été, c’est le temps qu’il aura fallu à Geneviève Castrée pour changer d’identité musicale en passant de Woelv à Ô Paon. Deux ans de gestation et quatre passages en studio à l’Hotel2Tango de Montréal pour préparer Courses
Ce nouvel opus annonce d’emblée sa différence avec les précédents albums de Geneviève, le ciel y est lourd et l’univers s’est assombri. Si les paroles sont plus graves, c’est qu’elle explore les zones d’ombre de notre société : les grandes friches industrielles, l’appât du gain, l’absurdité du pouvoir, la violence, la solitude. 
Savamment orchestré par Thierry Amar (Silver Mt Zion, Black Ox Orkestar, Godspeed You! Black Emperor), qui a su non seulement ajouter une texture particulière aux chansons, mais qui s’est aussi fait le traducteur de certaines idées, Courses est un album monté en boucles, riche en répétitions vocales et musicales qui nous entraînent inexorablement là où il veut nous mener, au regard que Geneviève porte sur cette déchéance. Et toute la force de l’album est dans ce regard qui saisit l’instant (« Je t’ai vue seule et abandonnée ») sans cynisme ni jugement. La tristesse contemple la tristesse. 
La vie est une course perdue d’avance, semble nous dire Geneviève, mais ne pariez pas sur mon cheval, il est trop fatigué. Et quand par moments la colère l’emporte, les musiciens (Nadia Moss, Sophie Trudeau, Jonah Fortune, Julie Houle et David Payant) unissent leurs forces pour faire lever la tempête. Humains et chevaux partent alors dans un galop effréné et chaotique, sans savoir où ils vont et sans plus se soucier des obstacles.











Port du casque obligatoire






Pour faire changement, voici un cimetière comme on les aime, en France, dans la vallée du Lot près de Saint-Cirq Lapopie. Où pour la première fois de ma vie, j'ai échappé mon objectif en voulant en changer, qui s'est empressé de rouler au fond d'un fossé rempli d'un épais buisson de ronces (à gauche hors cadre). Au mépris du danger, ignorant les épines et les animaux féroces qui n'attendaient forcément que moi, je me précipitai à sa suite pour le tirer de là. Mais si la chute est aisée, il en est autrement de la remontée, qui pour laborieuse qu'elle fût me vit néanmoins réapparaître vingt minutes plus tard, les genoux en sang mais l'oculaire intact, prenant dans mon élan cette putain de photo.

L'objectif atteint ne doit d'avoir eu la vie sauve qu'au pare-soleil crânement vissé sur son bout, comme quoi même en vadrouille dans la campagne le port du casque devrait être obligatoire.












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Mots dits français



Entendu à Paris en juillet.

- "Alors, demande l'homme de la rue, toujours poète?
- Oh! Toujours dans les mots", répond modestement l'imprimeur, qui n'a jamais rien fait d'autre que des calendriers et des publicités pour les commerçants du quartier.









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Nouvelles originales



Deux très jolis livres parmi les trésors rapportés de la vieille France, les deux parus dans la collection "Nouvelles originales" lancée en 1947 par les éditions de Minuit. De très beaux livres, tirés à 1000 ex numérotés, d'une quarantaine de pages, à la mise en page soignée et au format délicat.
Dans cette première série, on retrouve Un temps de petite fille, de Georges Henein, et America, de Henri Calet.










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Le nazi et le barbier




"Et qu'allez-vous faire avec ces dents? demanda Madame Holle.
- Commencer une nouvelle vie", dit Max Schulz.






- Le nazi et le barbier, Edgar Hilsenrath, Paris, éditions Attila, 2010.




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AF344




























Le vol AF344, à bord duquel nous eûmes comme un frisson avant qu'il ne se pose.












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Goose Bay





 
De retour de vacances, l'avion qui me ramenait a été contraint d'atterrir d'urgence sur l'aéroport de la base militaire de Goose Bay, au Labrador. Cinq cents passagers hagards dans une base désaffectée quelque part dans la toundra canadienne, et une architecture militaire qui n'est pas sans rappeler le charme russe, voilà de quoi marquer un voyage du sceau de l'imprévu.















"Je crois que le cinéma est une amélioration de la vie parce qu'il est extraordinaire."

Francois Truffaut










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Le bureau des épaves



Il existe à Casablanca un service d'objets trouvés surnommé le bureau des épaves; c'est aussi sous ce nom que fut étonnamment traduit le film Stranded, de Frank Borzage en 1935. Le savait-il? Peu importe, cela désigne aussi désormais cette très belle édition de l'un des tapuscrits confiés par l'auteur aux éditions Pierre Mainard en 2008.



Or de cinq heures dans le ciel rare,
le fleuve gris, la terre grise,
la mort aux doigts qui sentent l'amour
on lèche le temps, la langue est grise




(extrait de Cheval sous le talus des mort, in Le Bureau des épaves, éditions Pierre Mainard)




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- Le Bureau des épaves, Pierre Peuchmaurd, éditions Pierre Mainard, coll. "Courantes", 112 p. sous couverture à rabats, 11x17, 2010, ISBN 9782913751477, 12 euros.

Suite à la fin

Je pourrais parler des mystérieuses translations de haïkus d'Issa, le plus belge des poètes japonais, par Pierre Peuchmaurd. Je pourrais. Mais voilà que Thierry Horguelin l'a fait, avec l'élégance qu'on lui connaît. Comme son blog est de toute façon d'une agréable nécessité, autant le lire ici.

Puisque la fenêtre est ouverte, profitons en pour signaler la parution récente aux éditions Pierre Mainard de deux inédits de Peuchmaurd, Le Bureau des épaves, et L'Ivre mort de lierre.




Scènes champêtre
(Trois)

Le vent dans le ciel
les deux
moiselles sur la prairie

Des bisons de bulles
passent au find du tableu

*

Un large vent de viande
s'abat sur la fôret
sur les seins nus des rois
et le rire des marais

Ou simplement il pleut

*

Les sangliers dorment quand il pleut
Des oiseaux plats
traversent leurs ombres,
l'automne avale 
un dernier papillon





(extrait de L'Ivre mort de lierre)





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   Éditions Pierre Mainard, 14 place Saint Nicolas, 47600 Nérac

- Le Bureau des épaves, Pierre Peuchmaurd, éditions Pierre Mainard, coll. "Courantes", 112 p. sous couverture à rabats, 11x17, 2010, ISBN 9782913751477, 12 euros.
- L'Ivre mort de lierre, Pierre Peuchmaurd, éditions Pierre Mainard, coll. "Grands poèmes", 36 p. sous couverture à rabats, 15x24, 2010, ISBN 9782913751484, 8 euros.



















Pour célébrer la visite de la reine, rien ne vaut une bonne buanderie royale.








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Capharnaüm



C'est fait, c'est fou. Après huit longs mois de préparation, j'ai enfin réussi à m'évader quelque jours en dehors de Montréal. Et comme les choses sont parfois bien faites, le premier numéro de Capharnaüm est arrivé juste à temps pour se glisser dans mon sac.
Capharnaüm? Mais oui, il s'agit de la revue lancée ces jours-ci par les éditions Finitude, qui entendent donner à lire des nouvelles, des chroniques et des correspondances d'auteurs de leur catalogue, mais aussi des photos et des dessins, bref, autant de fragments dont ils assument fièrement le statut de fonds de tiroir.

Au programme de ce premier numéro, des textes de :
Raymond Guérin
Eugène Dabit
Marc Bernard
Jean-Pierre Martinet
Michel Ohl
Georges Hyvernaud
Robert Louis Stevenson
Georges Arnaud

Enfin, cette nouvelle publication nous plait jusque dans son nom, qui fait partie des mots que l'on aime avoir en bouche et dire tout haut, Capharnaüm, Bathyscaphe, Capharnaüm, Bathyscaphe, comme un certain Antoine Doinel dans Baisers volés, répétant jusqu'à épuisement Fabienne Tabard, Fabienne Tabard, Fabienne Tabard, Antoine Doinel, etc.


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Pour le plaisir toujours un peu étourdissant de revoir Jean-Pierre Léaud, voir les extraits ici et .


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Capharnaüm est disponible en France dans les bonnes librairies, et en Amérique à la librairie Le Port de tête.







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