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Mailloux, histoires de novembre et de juin




C'est en novembre dernier, au salon du livre de Montréal, que j'ai entendu pour la première fois parler de Hervé Bouchard. Il venait tout juste alors de gagner le Grand prix du livre de Montréal pour son deuxième roman - Parents et amis sont invités à y assister - et se trouvait du coup sur le stand de son distributeur pour y rencontrer d'éventuels lecteurs. Comme il se trouve que j'y étais aussi pour justifier mon titre de libraire ambulant, j'ai donc eu tout le loisir de le voir. Le regard perçant, presque dur, un visage fermé posé sur une vieille veste en cuir, notre homme n'était visiblement pas dans son élément. Ironie liée à ce genre d'évènements, deux "stars" des librairies québécoises (Fred Pellerin, bon, d'accord, mais pourquoi Jacques Godbout?) dédicaçaient à tour de bras le même jour sur le même stand. Par contraste, Bouchard me devenait donc forcément sympathique, malgré le regard dur, etc... et je me décidai à combler mon retard en achetant son premier livre.
On a dit de lui qu'il était l'héritier de Ducharme, et, pour ce que j'en sais, il y a du vrai là-dedans. Il y a aussi du Gaétan Soucy, celui de La Petite fille qui aimait trop les allumettes, que je tiens pour l'un des meilleurs livres de ces dernières années. Mais il y a surtout beaucoup de Hervé Bouchard.
Cet homme est un jongleur, une sorte d'équilibriste sans filet qui mène son écriture à la frontière entre prose et poésie, ne fait pas de concession, prend le langage, le triture, le malaxe et vous le renvoie en pleine gueule avec l'air de dire "débrouille toi avec, si ça te plaît pas c'est pareil". Évidement, ça peut rebuter, il serait même facile de refermer le livre tant les premières pages sont déroutantes. C'est que Mailloux appartient à cette catégorie de bons livres qui demandent d'abord un effort pour franchir les barrières qui l'entourent, puis un certain abandon pour se laisser embarquer.
À part ça, Mailloux est un livre sur l'enfance, celle de Jacques Mailloux bien sûr, mais pas seulement, sur la cruauté des gamins entre eux, sur la peur et la honte de soi que l'on trimbale toute une vie, et sur les conséquences des petites phrases anodines-assassines qui reviennent en écho.
Dans mon exploration de la littérature québécoise, après Réjean Ducharme, Gaétan Soucy et Sylvain Trudel, Hervé Bouchard vient donc s'ajouter tout naturellement à ma liste de "vrais" bons auteurs à ne pas lâcher.



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Je ne suis bien sûr pas le premier à parler de Bouchard, en voici d'autres, savamment réunis par son éditeur, le Quartanier.
Sylvain Trudel est publié par Les Allusifs, lesquels, non contents d'avoir un excellent catalogue, ont aussi un très joli site internet.



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