Photos, livres, aventures.

Adieu Fombonne





















Il serait à peu près aussi vain de vouloir résumer un roman d'Emmanuel Bove que de le faire avec un livre d'André Dhôtel ou, plus près de nous mon dieu, de Jean Echenoz, tellement chez ces gens-là l'histoire se répète et se décline sur des modèles souvent semblables.
Ses histoires ont un aspect suranné qui n'est pas sans évoquer le ton de certains classiques du XIXème. Lire Bove, c'est comprendre l'ennui éternel et la mélancolie lourde des dimanches de province. Dans Adieu Fombonne, l'anti-héros (puisqu'il ne saurait être question de héros) se nomme Charles Digoin, c'est un homme ordinaire, qui aspire à un confort petit bourgeois en vivant dans la crainte d'être rattrapé par son passé.
Rien de haletant, au contraire même. Mais l'intérêt de l'écriture de Bove, ce qui fait qu'on doit le lire encore aujourd'hui, c'est son sens aïgu du menu détail et sa rigueur dans le choix de chaque mot. Ajoutons à cela un penchant pour l'ellipse et le récit non linéaire, et l'on a un auteur de chez Minuit avant la lettre.



"Les lettres désagréables ont quelque chose de particulier. Le timbre lui-même ne ressemble pas à celui des autres lettres. Il paraît mieux collé, comme si on l'avait frappé du poing. Sans être graphologue, on découvre dans l'écriture des signes peu sympathiques. Le premier mot, Monsieur ou Madame, ou même Mademoiselle, n'a été écrit que par formalité."

 Adieu Fombonne, Emmanuel Bove, 1937, Le Castor Astral, 1994 et 2005.

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À lire aussi :
- Le pressentiment, Castor Astral, 2006
- Mes amis, Flammarion, 1993.



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Ô Paon



Une fois n'est pas coutume, c'est de musique qu'il sera question aujourd'hui, à l'occasion de la sortie du nouvel album de la dessinatrice-auteure-compositrice-interprète Geneviève Castrée.

Un automne, deux hivers et un été, c’est le temps qu’il aura fallu à Geneviève Castrée pour changer d’identité musicale en passant de Woelv à Ô Paon. Deux ans de gestation et quatre passages en studio à l’Hotel2Tango de Montréal pour préparer Courses
Ce nouvel opus annonce d’emblée sa différence avec les précédents albums de Geneviève, le ciel y est lourd et l’univers s’est assombri. Si les paroles sont plus graves, c’est qu’elle explore les zones d’ombre de notre société : les grandes friches industrielles, l’appât du gain, l’absurdité du pouvoir, la violence, la solitude. 
Savamment orchestré par Thierry Amar (Silver Mt Zion, Black Ox Orkestar, Godspeed You! Black Emperor), qui a su non seulement ajouter une texture particulière aux chansons, mais qui s’est aussi fait le traducteur de certaines idées, Courses est un album monté en boucles, riche en répétitions vocales et musicales qui nous entraînent inexorablement là où il veut nous mener, au regard que Geneviève porte sur cette déchéance. Et toute la force de l’album est dans ce regard qui saisit l’instant (« Je t’ai vue seule et abandonnée ») sans cynisme ni jugement. La tristesse contemple la tristesse. 
La vie est une course perdue d’avance, semble nous dire Geneviève, mais ne pariez pas sur mon cheval, il est trop fatigué. Et quand par moments la colère l’emporte, les musiciens (Nadia Moss, Sophie Trudeau, Jonah Fortune, Julie Houle et David Payant) unissent leurs forces pour faire lever la tempête. Humains et chevaux partent alors dans un galop effréné et chaotique, sans savoir où ils vont et sans plus se soucier des obstacles.











Port du casque obligatoire






Pour faire changement, voici un cimetière comme on les aime, en France, dans la vallée du Lot près de Saint-Cirq Lapopie. Où pour la première fois de ma vie, j'ai échappé mon objectif en voulant en changer, qui s'est empressé de rouler au fond d'un fossé rempli d'un épais buisson de ronces (à gauche hors cadre). Au mépris du danger, ignorant les épines et les animaux féroces qui n'attendaient forcément que moi, je me précipitai à sa suite pour le tirer de là. Mais si la chute est aisée, il en est autrement de la remontée, qui pour laborieuse qu'elle fût me vit néanmoins réapparaître vingt minutes plus tard, les genoux en sang mais l'oculaire intact, prenant dans mon élan cette putain de photo.

L'objectif atteint ne doit d'avoir eu la vie sauve qu'au pare-soleil crânement vissé sur son bout, comme quoi même en vadrouille dans la campagne le port du casque devrait être obligatoire.












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Mots dits français



Entendu à Paris en juillet.

- "Alors, demande l'homme de la rue, toujours poète?
- Oh! Toujours dans les mots", répond modestement l'imprimeur, qui n'a jamais rien fait d'autre que des calendriers et des publicités pour les commerçants du quartier.









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