Photos, livres, aventures.

Fleurs bleues contondantes






















Pour ceux qui en douteraient encore, les CRS ne sont pas de simples machines, et sans aller jusqu'à dire qu'ils ont une âme, voici un lointain rappel de leur fragilité et de leur sensibilité.

Par esprit d'escalier, cela me rappelle La fleur bleue contondante, du merveilleux Boby Lapointe, le chanteur de la place de la Contrescarpe, et je me prends à rêver d'un quatuor magique: Alphonse Allais au saxo ténor, Raymond Queneau à la basse, et Jacques Prévert à la batterie.







Du bruit, de la fureur et des orang-outans

Y a t-il une vie en dehors du travail? Quand on officie comme moi dans une volumineuse librairie, en période de pré-prix littéraires, submergé par un tsunami quotidien de nouveautés et de réassort "spécial Noël", la semaine de la sortie du dernier volet des aventures du magicien acnéique dont la seule évocation provoque le bruit et la fureur, alors la réponse est non.

Heureusement, le soir, avant de me consacrer quelques minutes au sommeil, j'offre à mon esprit un moment de répit salvateur. Il faut dire que le bateau que nous attendions à finalement accosté et que, profitant de la longueur démesurée de leurs bras pour précéder les rats dans leur course, les orang-outans ont quitté le navire pour venir se glisser entre les pages d'un livre blanc que je m'apprêtais à lire.

Il s'agit bien évidement de Sans l'orang-outan, le nouveau et très bon roman d'Éric Chevillard, que nous ne présentons plus.







Peinture rupestre


















Peinture rupestre dans les ruelles, c'est rassurant, cela veut dire que je n'ai pas encore épuisé toutes les ressources du quartier.

L'échangeur échangé


















Changer l'échangeur, le Turcot, le monstre du pont Champlain de Montréal, afin de le mettre "à plat" et sans jamais interrompre le trafic, tel est, sur dix ans, le défi lancé aux ingénieurs.
Il est donc temps de photographier ce mastodonte afin d'enrichir nos archives futures, section Je me souviens de l'architecture.







Aérien quoi qu'il en soit

À l'instant même, des bruits bien étranges viennent du dehors, à la fois sourds et aériens. Les voisins, comme moi, se pointent à leur fenêtre.
De deux choses l'une, soit c'est un feu d'artifice, soit c'est la guerre. Sauf que je ne vois vraiment pas pourquoi on tirerait un feu d'artifice ce soir.







Hasardeux calendrier















M
a semaine commence le vendredi en début d'après-midi, rien d'extraordinaire donc, à ce que je la finisse le lundi soir. Du même coup, du mardi au jeudi je suis en week-end, le lundi soir devient mon vendredi soir, je fais mes courses au supermarché le mardi en même temps que personne, et le mercredi matin je ne vais pas à l'église.
Afin de ne pas perturber ce rythme naturel, c'est tout naturellement que j'ai fait ce soir une petite sieste entre neuf heures et dix heures, histoire d'être en forme pour faire un tour du quartier vers minuit. Le but de la manœuvre était simplement d'étrenner mon nouvel appareil et de faire un crochet pour rapporter des bagels.
Sauf que, mystères et barricades, de voir passer un bus loin de son itinéraire m'ayant intrigué, je me suis approché du boulevard Saint-Laurent. Où je suis tombé sur un barrage policier m'intimant uniformément de passer mon chemin.
Bon, ça doit être un accident me dis-je en m'engageant dans la rue parallèle et suivante pour ne pas perdre le nord. Sauf que non, au bout du compte le quartier était bel et bien verrouillé, au point de croiser devant mon café préféré des hommes en noir, casque sur la tête et fusil à la main.
Pour un peu je me serais senti seul au milieu du carrefour.










La zone d'inconfort















E
n règle générale, lire des nouvelles de Raymond Carver revient à pénétrer directement dans l'intimité de gens ordinaires au moment où ils sont confrontés, sinon à une crise majeure, du moins à un choix difficile. Puis le rideau se referme aussi vite qu'il s'était ouvert, laissant le lecteur en proie à une certaine mélancolie, sans avoir le fin mot de l'histoire.
Dans cette Amérique des années 70, Jonathan Franzen grandissait dans une banlieue vaguement bourgeoise de Saint-Louis.
Or, dans son dernier livre, La Zone d'inconfort, l'auteur des Corrections revient sur ces années de sa vie, de son adolescence dans le Missouri à ses premières années de mariage à New-York, au cours desquelles il a lentement construit son identité actuelle.

Cela nous est donné à lire sous la forme de six longues nouvelles qui sont comme autant d'épisodes incomplets et désordonnés qui, justement, rappellent l'univers de Carver.
De digressions en parenthèses, Franzen évoque tour à tour l'attachement de ses parents aux valeurs morales, les week-end d'intégrations mixtes organisés par Camaraderie, le groupe paroissial de Webster Groves, les chahuts dans son lycée, sa découverte de la littérature allemande dans la langue, une interprétation sociologique de Charlie Brown et de Peanuts et sa passion pour l'ornithologie en dépit de ses piètres qualités d'observation.
Ça a la douceur de l'anodin et la profondeur du souvenir, la légendaire efficacité de la simplicité à l'américaine, et une pincée d'humour désabusé à l'européenne.


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La Zone d'inconfort, Paris, éditions de l'Olivier, 2007, 253p., 21 euros/29,95$ Can.

La nuit américaine


















Tandis que, rapides et silencieux, A. et moi rampions sous les wagons pour tenter d'échapper à nos poursuivants, la lumière crue des projecteurs éclairant la scène comme en plein jour menaçait fort de rendre notre évasion impossible. Quand soudain.












Le cerveau en cavale









































Sur la "track" de chemin de fer qui traverse Montréal, vaste terrain de jeux et source de belles images, tandis qu'avec une amie nous jouions à cache-cache avec la surveillance des lieux, nous avons croisé cette bien étrange apparition.




Oies du sud

On me dit que l'été n'est pas fini, qu'on a de la chance qu'il fasse encore si beau, tout ça. Bon, je veux bien. N'empêche que cette nuit encore j'ai entendu les oies sauvages passer, et pas de doute, c'est bien au sud qu'elles s'en vont. Alors?









L'Autofictif animalphabête





















"M'expliquera-t-on enfin pourquoi les chaussures nous sont vendues dans des cercueils de chats ou de lapins domestiques?"


Excellente question, à laquelle j'aurais néanmoins la pudeur de ne pas répondre publiquement. Du reste, on ne s'étonnera pas que ce soit Éric Chevillard qui la pose.
N'est-il pas écrivain? Certainement. Les animaux de tous crins ne traversent-ils pas ses livres sans même prendre la peine de regarder? Assurément.
Par exemple tenez. Imaginons que, inconfortablement assis à la table de la cuisine qui me fait office de bureau, l'envie me prenne de me renseigner sur les mœurs des hérissons naïfs et globuleux, je n'ai pour cela qu'à tendre le bras et relire
Du hérisson.
Admettons que le lendemain, ce que je croyais depuis plusieurs jours n'être qu'une longue éclipse de soleil s'avérait finalement être une solide et menaçante invasion de mouches. Là non plus, pas de panique, car je sais que le Vaillant petit tailleur m'apportera la solution.
Il n'est pas rare qu'au milieu de la nuit je m'interroge sur les origines insondables du Palafox.
Enfin, nous ne désespérons pas qu'un jour le lent transatlantique porteur de containers entiers d'exemplaires de Sans l'orang-outan finisse par accoster à Montréal.

En attendant, dès que j'aurais fini de remercier comme il se doit Éric Chevillard d'avoir écrit un jour cette merveille de livre que sont Les Absences du capitaine Cook, je retournerai à la lecture de son blog. Car depuis peu, Chevillard nous offre trois microfictions par jour.

Ça s'appelle l'Autofictif, et on espère que ça va durer.




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Les livres d'Éric Chevillard ont paru pour la plupart aux éditions de Minuit, et parmi eux nous recommanderont chaudement les suivants:

- Les Absences du Capitaine Cook, 2001.
- L'Oeuvre posthume de Thomas Pilaster, 1999.
- Palafox, 1990
- Du hérisson, 2002.

Son dernier livre, Sans l'orang-outan, vient de paraître chez Minuit lui aussi.